Et c'est évidemment choquant.
Et c'est un danger bien sûr,
parce qu'encore une fois on touche à quelque chose d'assez sensible qui est
l'entrée en vigueur de ce contrat et la fin de ce contrat.
On ne peut pas permettre à une partie de manipuler un événement extérieur
de façon à faire en sorte que le contrat n'entre pas en vigueur, ou au contraire
que le contrat prenne fin, et ceci contrairement aux règles de la bonne foi.
Et alors donc, vous avez,
dans les ordres juridiques, c'est le cas en droit suisse mais c'est un principe
qu'on trouve dans la plupart des ordres juridiques, une limite
sur les possibilités de manipulation des conditions par les parties.
En droit suisse, c'est l'article 156 du code des obligations.
Il n'est pas très bien rédigé, mais il prévoit que si une partie manipule une
condition, contrairement aux règles de la bonne foi, eh bien le juge doit faire
comme si la condition suspensive était survenue, et donc le contrat entre en
vigueur, ou la condition résolutoire n'est pas survenue, et donc le contrat continue.
C'est une possibilité qui est toujours à la disposition de l'autre partie,
qui consiste à dire, d'accord, la condition suspensive n'est pas survenue,
d'accord la condition résolutoire est survenue, mais cette condition
a été manipulée contrairement aux règles de la bonne foi, par la partie adverse,
et par conséquent il faut faire en sorte soit que ce contrat soit en vigueur,
soit que ce contrat ne prend pas fin parce qu'on peut pas admettre cette manipulation
de la condition contrairement aux règles de la bonne foi.
C'est l'article 156 du code des obligations en droit suisse.
Il y a beaucoup de jurisprudence qui tourne autour de cet article 156,
ce qui montre que dans le fond cette tentation d'une manipulation de la
condition existe et qu'elle a donné lieu à de nombreux litiges.
Mais à vrai dire c'est un principe universel, et vous trouvez par exemple
dans les principes unidroit, les principes unidroit qui sont applicables au commerce,
aux contrats du commerce international, principes 2010, à peu près à la même
clause, c'est l'article 5.3.3 de ces principes unidroit.
Interference with conditions.
Et je vous laisse lire, et la clause va peut-être s'afficher devant vous.
If fulfilment of a condition is prevented by party,
contrary to the duty of good faith and fair dealing or the duty of cooperation,
that party may not rely on the non-fulfilment of the condition.
Si une condition suspensive est manipulée par une partie, celle-ci
ne peut pas se prévaloir du fait que cette condition suspensive n'a pas été réalisée.
Ou alors, chiffre deux, if fulfilment of a condition is brought about by a party,
contrary to the duty of good faith and fair dealing or the duty of cooperation,
that party may not rely on the fulfilment of the condition.
À l'inverse, s'il s'agit d'une condition résolutoire, et qu'elle
a été provoquée contrairement aux règles de la bonne foi par une des deux parties,
celle-ci ne peut pas se prévaloir du fait que la condition résolutoire est survenue.
Donc, ce sont des principes universels en réalité, et ce sont des principes qu'il
faut avoir en tête lorsque l'on intègre dans un contrat une condition.
Il faut expliquer à nos clients que bien sûr la condition fonctionne,
que c'est tout à fait valable, que c'est enforceable,
pour prendre une expression anglo-saxonne à cet égard.
Donc, les juges respectent les conditions qui sont prévues dans les contrats, qu'il
s'agisse de conditions résolutoires ou qu'il s'agisse de conditions suspensives.
Mais, ce n'est pas une raison pour les manipuler.
Et si une des deux parties cherche à les manipuler,
eh bien elle trouvera en face d'elle des règles du droit suisse,
des principes unidroit en matière de commerce international,
ou d'autres règles du droit applicable, selon le choix qui aura été fait par les
parties, qui sanctionneront cette manipulation abusive de cette condition.