Bonjour, bienvenue au MOOC Restructuration des quartiers précaires des villes africaines. Notre vidéo d'aujourd'hui est consacrée aux objectifs, enjeux, et stratégies de la restructuration des quartiers précaires. Les déguerpissements ont en effet montré leurs limites. Ils induisaient des coûts élevés sur les plans, social, économique et sécuritaire, et étaient souvent à l'origine de troubles sociaux. C'est ce qui explique qu'à la fin des années 60 des courants de pensée se sont affirmés. John Turner en était la figure emblématique pour soutenir une approche qui privilégie, plutôt que la démolition, l'amélioration de l'environnement des pauvres et leur implication directe dans les projets qui les concernent. Le quartier précaire n'est plus considéré comme une manifestation malheureuse de la pauvreté urbaine, mais bien comme une question centrale du développement urbain, dont il convient d'apporter une solution convenable. Les institutions de financement ont aussi tiré les sonnettes d'alarme et un consensus s'est désormais instauré pour l'intervention directe dans les quartiers. C'est le souhait de tous, les états, les collectivités locales, les bailleurs de fonds et même les populations. Nous examinerons cette leçon suivant le plan en quatre points que voici. Dans le premier point, nous verrons le consensus autour de la réhabilitation, restructuration aujourd'hui ; ensuite, nous verrons les objectifs, les enjeux et les défis qui s'attachent à ce type d'opérations. Du point de vue des bailleurs de fonds, il s'agit de la nécessité d'une intervention vigoureuse, dans ces quartiers précaires, lieux de concentration de la pauvreté, dans le but d'enclencher un cercle vertueux, qui conduira à l'évolution, tant physique que sociale, des quartiers. Pour les autorités, il s'agit d'intervenir pour éliminer les divers risques sanitaires, environnementaux, sécuritaires et sociaux auxquels sont exposées les populations. C'est une façon également d'anticiper les risques politiques pouvant découler de troubles ou de soulèvements consécutifs à des événements non prévus. Du point de vue des collectivités locales et des élus, la restructuration des quartiers précaires autorise de penser un développement global, à l'échelle de leur territoire, et de sortir ainsi des actions de saupoudrage, dont les effets sont faibles et éphémères. Enfin du point de vue des habitants, c'est l'opportunité d'une revalorisaton de leur cadre de vie, et d'être enfin considérés comme un citoyen à part entière, profitant de la ville, et capable de s'épanouir en jouissant de ses commodités. En termes d'objectifs, il s'agit en premier lieu d'agir en faveur d'une meilleure intégration urbaine et sociale aussi bien de l'entité urbaine que des populations qu'elle accueille. Le second objectif est plus large, et concerne la nécessité de soigner l'image de la ville en éliminant ce qui pourrait l'entacher, vu de l'extérieur. Et enfin, l'objectif d'une restructuration et la lutte contre la pauvreté, l'exclusion, et la recherche d'une amélioration des conditions difficiles d'existence dans ces quartiers. Sur le plan des enjeux, il est utile de distinguer deux niveaux. D'abord, au niveau individuel, c'est la sécurité foncière qui prime ; au niveau collectif, c'est de façon générale l'amélioration globale du cadre de vie qui prime, avec en priorité l'accès à l'eau potable, et ensuite le renforcement du niveau des équipements surtout ceux de proximité, à savoir, les écoles et les centres de santé. Un second objectif à atteindre est une intégration physique, rapide, de manière à relier le quartier au reste de l'agglomération au moyen de liaisons motorisées qui facilitent la mobilité des personnes. Et enfin, la nécessité de créer des opportunités économiques qui vont renforcer l'attrait du quartier, favoriser la résidence dans le quartier, et offrir des possibilités d'emplois sur place ; à défaut de cela, le quartier restera dépendant du reste de l'agglomération et subira les difficultés d'une cité dortoir. Les défis à surmonter pour parvenir aux objectifs dont on vient de parler sont nombreux. Il s'agit d'abord de contenir les nouvelles arrivées dans le quartier au moment du démarrage du projet pour ne pas biaiser les estimations et retarder ainsi sa mise en œuvre. Il convient ensuite d'œuvrer au façonnement d'un cadre nouveau, juste attractif, pour ne pas susciter de convoitises de la part de populations extérieures. L'exécution du projet gagnerait également en efficacité si les structures chargées de sa mise en œuvre sont capables d'assurer une parfaite équité et une transparence à toute épreuve de leurs interventions. Ce genre de projet est en effet toujours source de conflits et de litiges et ce sera le rôle de l'encadrement de veiller à les réduire au strict minimum et de leur trouver un arbitrage consensuel. La restructuration est une opération complexe. Elle implique plusieurs acteurs, depuis les administrations et les services techniques, en passant par les bailleurs de fonds, les bureaux d'études techniques, les ONG. Il devient alors indispensable d'organiser un bon encadrement institutionnel du projet, de manière à assurer une bonne coordination entre les différents intervenants. C'est cela la maîtrise d'ouvrage ; elle regroupe l'ensemble des missions et des tâches de pilotage stratégique et de management portées par le bénéficiaire d'un projet, depuis la conception jusqu'à la mise en œuvre, ou l'exploitation. En général, les maîtres d'ouvrages exercent directement leur responsabilité. Il arrive cependant qu'ils confient cette mission à un mandataire, chargé de les représenter, c'est ce qu'on appelle la maîtrise d'ouvrage déléguée. Le maître d'ouvrage délégué agit en lieu et place du maître d'ouvrage, mais il n'a pas toute latitude dans son intervention. Il a d'abord une obligation de moyens, c'est-à-dire qu'il doit apporter tous les moyens et tous les soins pour le bon accomplissement de sa mission. Il doit ensuite rendre compte, cela signifie qu'il représente le maître d'ouvrage, et il doit de ce fait lui rendre compte périodiquement du déroulement de la mission. Enfin, il n'a pas de responsabilité automatique. Cela veut dire qu'il a la responsabilité de sa seule faute personnelle. En tout état de cause, il doit signer avec le maître d'ouvrage une convention de maîtrise d'ouvrage déléguée, qui précise ses attributions, les modalités de sa rémunération, les pénalités encourues, ainsi que les conditions de résiliation et les modalités d'achèvement de sa mission. Comme nous venons de le voir, la restructuration des quartiers précaires ne s'est imposée qu'à partir du moment où on a eu la conviction qu'ils ne disparaîtront pas de sitôt. Cette idée devait encore être partagée par tous pour être intégrée par les politiques publiques soutenues par les principaux bailleurs de fonds. Malgré de nombreux défis, les enjeux l'emporteront dans la majorité des cas pour donner lieu à des expériences diverses qui consacrent désormais cette pratique comme la plus pragmatique, la plus humaine, à condition que les populations bénéficiaires soient pleinement et directement impliquées dans la conception et la mise en œuvre des projets.